[MUSIQUE] [MUSIQUE] Nous venons de voir quels acteurs financiers peuvent agir pour mieux se prémunir contre les risques liés au changement climatique, en intégrant les informations fournies sur ce plan par les entreprises qui y sont exposées. Nous allons voir maintenant qu'ils mettent aussi au point de nouveaux produits qui rencontrent un succès croissant. Nous allons évoquer ici deux exemples significatifs : les obligations vertes et les indices bas-carbone. Les premières obligations vertes de montants importants ont été émises en 2007-2008 par la Banque européenne d'investissement et la Banque mondiale. Depuis, leur marché croît rapidement. En 2019, les émissions d'obligations vertes ont dépassé les 250 milliards de dollars, soit environ 4 % des émissions mondiales d'obligations. Ce chiffre est calculé par la Climate Bonds Initiative, une organisation financée par des acteurs publics et privés pour mobiliser le marché obligataire sur les réponses à apporter au changement climatique. Qu'est-ce qu'une obligation verte? Il s'agit d'un titre de créance émis sur le marché par une entité publique ou une entreprise, dont le produit de l'émission est utilisé exclusivement pour financer ou re-financer partiellement ou en totalité des projets verts nouveaux et en cours. L'application des green bonds principles est recommandé pour distinguer les obligations vertes des autres. En particulier, l'émetteur est incité à demander à un expert indépendant une deuxième opinion sur l'obligation et à s'engager à rendre compte de l'usage des fonds sur la durée de ces obligations. L'intérêt principal des obligations vertes est de permettre au prêteur de mettre son argent au service de la transition. Le problème principal qui se pose est précisément la question de la garantie que c'est bien le cas. Plusieurs questions se posent : la définition de ce qui est vert ou pas vert ou moins vert, la preuve que le projet financier est conforme à cette définition, et que les fonds vont bien y être affectés. C'est pour cela que la Commission européenne a lancé en 2018 un gros travail de taxonomie verte qui fait l'objet d'un projet de règlements qui devrait être adopté en 2020. Elle a lancé également en juin 2020 une consultation ciblée sur l'adoption d'une norme européenne pour les obligations vertes. Le but est d'aider les souscripteurs à y voir plus clair face aux déclarations des émetteurs et aux divers labels existants. En effet, le risque principal du marché des obligations vertes c'est que celles qui sont émises, comme on l'a vu, sur la base d'une démarche volontaire, ne soient pas vraiment vertes et ne soient qu'un habillât de communication visant uniquement à redorer le blason de l'émetteur. Les démarches visant à plus de rigueur sont donc importantes à encourager et à faire connaître dans l'intérêt de tous. Je vais maintenant évoquer les indices bas-carbone. On sait qu'une partie des fonds gérés par les gestionnaires d'actifs pour le compte des investisseurs le sont de manière passive. L'idée sous-jacente est qu'il est difficile, par des choix délibérés, de faire mieux que le marché dans son ensemble et que c'est, en tout état de cause, source de frais de gestion. Je ne trancherai pas ici l'intense controverse théorique autour de cette idée. Certains pensent qu'il est possible par des choix judicieux de battre le marché ; d'autres non. Il est certain cependant qu'un gestionnaire passif ou actif qui veut favoriser la lutte contre le changement climatique ne peut pas se contenter de suivre le marché comme nous allons le voir. Parmi les modalités de la gestion passive, on trouve la gestion indicielle, qui consiste à investir dans un ETF pour Exchange-Traded Fund, ou fonds indiciel coté. Comme un fonds traditionnel, un ETF est un panier de titres financiers. Cependant, sa gestion est automatisée, et le fonds achète tout simplement l'ensemble des actions ou des obligations d'un indice boursier. Mais les indices boursiers comme le CAC 40, l'Europe STOXX 600 ou le Dow Jones sont l'image de l'économie actuelle, qui est trop carbonée. Investir dans un tel indice c'est donc contribuer de fait au business as usual et au changement climatique. C'est pourquoi les acteurs financiers comme Euronext, avec l'indice LC-100, ont mis au point des indices bas-carbone. Dès lors, il est possible de créer des ETF qui les répliquent. Comment se construit un indice de carbone? La méthode la plus simple consiste à sélectionner au sein d'un indice donné, secteur par secteur, les entreprises les plus performantes du point de vue climatique. Comment faire cette évaluation? À partir des informations que fournissent les entreprises, il est possible de connaître ou de calculer leur bilan carbone, les émissions de gaz à effet de serre que leurs produits ou services permettent d'éviter, de savoir si elles font des progrès et réduisent leurs propres émissions, et enfin de savoir si elles investissent dans le cadre d'une stratégie décarbonée. À partir de ces données quantitatives et qualitatives, il est possible de classer les entreprises d'un secteur donné et de retenir les meilleures. C'est ce que propose Carbon4 Finance, qui fournit les données nécessaires à l'indice LC-100 dont je viens de parler. En conclusion, il est intéressant de constater que le monde financier n'est pas indifférent au changement climatique et innove pour créer de nouveaux produits pour y faire face. On peut penser que ce n'est que le début, mais, comme je l'ai déjà dit, il serait dangereux de ne compter que sur ces démarches volontaires. La lutte contre le changement climatique suppose une mobilisation d'ensemble, et tous les leviers doivent être utilisés. Il appartient à la puissance publique au niveau international, européen et national de créer le cadre réglementaire, normatif et fiscal qui oblige tous les acteurs à aller dans la bonne direction. [MUSIQUE] [MUSIQUE]