[MUSIQUE] [MUSIQUE] Pour pleinement s'approprier les enjeux du changement climatique, il faut savoir de quoi on parle. Cela passe donc par la mesure. Depuis plusieurs années, les entreprises développent de nouveaux outils de comptabilité afin d'intégrer les impacts environnementaux de leur activé dans leurs réflexions opérationnelles et stratégiques. Kering a été une entreprise pionnière en la matière avec la mise en place de son nœud EP&L, Environmental Profit & Loss, dès 2011. D'abord appliqué à la marque Puma, cédée en 2018 aux actionnaires de son groupe par distribution des actions dans le cadre de la stratégie de recentrage sur le luxe de Kering, la démarche a ensuite été élargie à l'ensemble du groupe en 2017. Pierre angulaire de la démarche de développement durable de Kering, le compte de résultat environnemental permet d'identifier, de quantifier, puis de traduire en valeur monétaire les impacts des activités du groupe sur l'environnement. Afin de mesurer son empreinte environnementale, EP&L croise six grandes catégories : la pollution de l'air, les gaz à effet de serre, l'utilisation des sols, la production de déchets, la consommation de l'eau et la pollution de l'eau. Ces six domaines d'impacts sont ensuite déclinés sur cinq niveaux différents de la chaîne d'approvisionnement, ce qui permet d'obtenir la matrice suivante qui apparaît à l'écran. Nous allons voir quels sont les points forts et les limites de cette approche pionnière, encore assez unique dans une forme aussi aboutie. Premier avantage, la démarche holistique de l'EP&L est particulièrement intéressante car elle tente de prendre en compte l'ensemble des impacts environnementaux, et ceci à toutes les étapes de la chaîne de valeur. Cet outil va donc bien au-delà d'un simple bilan carbone ou de ce qu'imposent les reporting environnementaux ou extrafinanciers classiques. L'EP&L permet ainsi de révéler à quel niveau, à quel stade se situent les impacts de l'entreprise. Pour Kering, l'EP&L a mis en évidence la très forte prédominance des impacts amont. Trois quarts des impacts environnementaux du groupe surviennent au début de la chaîne d'approvisionnement, plus de 60 % pour la production de matières premières, le stade numéro 4, et 10 % pour la transformation, c'est le stade numéro 3. Ces résultats ont encouragé le groupe à mettre l'accent sur les politiques de sourcing et sur la recherche de matériaux, procédés ou de technologies plus durables. L'EP&L est aujourd'hui utilisé par Kering comme un outil pour travailler avec les fournisseurs afin de développer un approvisionnement et des systèmes de production plus durables. Néanmoins, il faut noter que si son périmètre dépasse le cadre des Scopes définis par le GHG Protocol, l'EP&L de Kering n'intègre pas encore les phases d'utilisation et de fin de vie des produits. Il procède à une analyse dite cradle-to-gate, c'est-à-dire de la production à la distribution en magasins, et non à une analyse cradle-to-grave, du berceau à la tombe. Kering explique cette absence par la faible prépondérance de ces phases par rapport au reste du cycle de vie, étant donné la nature luxueuse des produits vendus et donc leur durabilité. Il n'en demeure pas moins que le devenir des déchets des emballages des produits achetés par le consommateur par exemple constitue un enjeu important. Le deuxième avantage est que l'EP&L est un formidable outil de communication et de prise de décisions. La traduction en valeur monétaire permet de s'adapter au langage traditionnel de l'entreprise et d'amorcer un dialogue avec l'ensemble des collaborateurs et des parties prenantes du groupe, qu'ils soient familiers des enjeux environnementaux ou non. Cette monétarisation facilite également l'intégration des enjeux environnementaux dans les processus de prises de décisions en offrant un moyen de comparaison pour des projets ayant des impacts différents. Cependant, cette traduction des impacts en termes monétaires constitue encore un enjeu complexe pour les entreprises. Et à ce jour, on peut déplorer une absence de standardisation sur les méthodes de valorisation monétaire des externalités, notamment pour le prix du carbone. Cet exercice reste donc pour le moment réservé à quelques entreprises pionnières, et ne permet pas encore de réaliser des comparaisons entre elles. C'est pourquoi Kering s'est engagé depuis plusieurs années à rendre publique sa méthodologie afin de contribuer à l'élaboration d'un cadre de référence commun. [MUSIQUE] [MUSIQUE]